MUSTANG ad eternam

Chronique musicale (2021)
          Sorti en mars 2021, plus d’une décennie après leur premier opus, Memento Mori était attendu au tournant. Ceux que l’on croyait disparus, existent-ils encore ?

          Ça faisait un bout de temps que le trio auvergnat n’avait pas fait parler de lui. Rappelez-vous MUSTANG. Ces p’tits mecs bien propres sur eux, de Clermont, avec Jean FELZINE et sa voix d’or à la Elvis, Nicolas MUSSET, le batteur (qui remplace Rémi FAURE) et Johan GENTILE, le bassiste. Rappelez-vous leur premier succès avec A71 en 2009 qui les porta jusqu’au pays du Soleil Levant. Non ? ça ne vous dit rien ? Je continue alors. Vient Tabou en 2011 puis Écran Total (2014). Et après ? Le désert ? Ne dites surtout pas cela à Jean qui verrait rouge. Entre un EP Karaboudjian avec l’insolent Salauds de pauvres, une tournée en 2017 avec le groupe BLONDIE, son duo avec sa compagne Jo WEDIN ou l’écriture de chansons pour d’autres artistes, son MUSTANG n’a jamais faibli. La bête s’est affutée.
 
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Un sacré bidouillage sonore

Et BIM ! Sans crier gare, le trio a ressurgi, aiguisé sa plume, travaillé ses riffs de guitare nerveux, sorti les synthés. Du bon et beau bidouillage sonore comme on les aime. Du rock'n’roll bien sûr, la base de MUSTANG. Leurs mentors : Elvis PRESLEY, Roy ORBISON, Buddy HOLLY…mais n’allez pas leur coller une étiquette rockabilly. D’ailleurs Jean a perdu sa banane. Ces gars écoutent aussi les STOOGES, Johnny CASH et le VELVET UNDERGROUND. Et de la country. Et du folk. Et de la pop. Leur marque de fabrique : des chansons en français aux paroles bien foutues, ciselées, parfois décapantes. Un groupe en acier trempé (excusez ce jeu de mots un peu facile).

 
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Un album revenchard

Memento Mori, c’est un peu leur revanche vis à vis de ceux qui les croyaient morts. Eux les éternels challengers à chaque sortie d’album. Celui-ci nous sert onze chansons à l’énergie brute et honnête. Honnête comme le titre d’ouverture (Loyal et honnête) qui plante le décor car il le « confesse à Dieu tout puissant /J’ai pêché à vouloir être plus blanc que blanc/ Moi qui me piquais de vertu/ Je pétais plus haut que mon cul ». Arrive Fils de Machin, plein d’humour, qui vise celles et ceux qui « Fils de quelqu’un/Légende du cinéma/Fils de machin/Toi tu fais Taratata ». Suivez mon regard. D’ailleurs le peintre-philosophe David SIMONETTA, qui a fait la pochette de l’album et les visuels, brosse les traits d’une Lou DOILLON plus vraie que nature. Puis MUSTANG enfourche un titre nerveux tout au long duquel Jean se demande s’il a Perdu (son) temps. Surgit soudain Pôle emploi/Gueule de bois. Ça passe ou ça casse. A la première écoute j’ai dis « Ciao ! ». Puis j’ai réécouté. MUSTANG ne fait pas de chichi, ne chante pas pour nous plaire mais pour nous dire ce qu’il a envie. Ce titre dérange, il sent la crasse, les relents d’alcool, les tâches grasses sur le vieux jogging et le pet. C’est lui-même qui le dit : « Je vais péter tranquillement sur mon sofa/Et regarder Gordon Ramsay sur Téva/Je vais commander une énorme pizza/Laisse-moi profiter de ma gueule de bois ». Comme une saynète, il raconte le quotidien trivial d’un mec (un intermittent du spectacle, lui ! ) qui attend chaque mois le virement de Pôle-Emploi pour se saouler la gueule, sans autre envie. Tout le reste a disparu.
 
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Encore soif ?

La force de MUSTANG, vous aurez compris, c’est de nous parler de tout, et de nous. Le plus simplement possible. Avant d’évoquer le titre éponyme (Oups, mon rédac’chef a en horreur ce mot ! ), un petit détour par le très ironique Dissident qui « parle des gens qui se disent libres-penseurs, détachés des récits officiels, mais qui récitent ceux de leurs gourous » (cf. interview de MUSTANG, revue PERSONA n°15). Ou par la balade La Maison sur la colline, une reprise du songwriter de folk-country Hank WILLIAMS pour ne pas oublier que MUSTANG vient aussi de là. Si vous avez encore soif, Le Vin vous ira car, en voisine des vignes du Saint-Joseph que je suis, je ne peux qu’applaudir ces mots : « Le vin/Bois-le comme un esthète/Ou comme un paysan/Le vin/Il fait mal à la tête/Mais comme on l’aime tellement/Le vin ». Idéale transition pour passer à Pas cher de la nuit où, dans un feu d’artifice de riffs-ravageurs, Jean tâte de l’insomnie. Ici pas de vin mais du whisky : « Dans mon cerveau/Des choix infinis/Mais tout s’équivaut/Tout part à l’eau/Dans des verres de whisky/Je donne pas cher de la nuit ».

OUF. Nous voici arrivés au titre… Memento Mori. MUSTANG se la joue grave, sombre, intello-philosophe avec la citation stoïcienne « Souviens-toi que tu vas mourir » susurrée à notre oreille. Mais ne vous y trompez pas, la suite est là pour nous montrer la vraie voie : « Tu auras l’air tout petit/Au funérarium de Chauny (…) /Juste ce tas de viande avachie/Qui n’ira pas au paradis/Memento mori ».

Je ne sais si c’est en enfer que ces trois-là nous convient, mais moi je les suis les yeux fermés. Et vous ?
 

Le Cri de la Mouette

Correspondante d'Ardèche
(22 juin 2021)

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MUSTANG. Memento Mori (Close Harmonie/Prestige mondial, 2021)
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Pour prolonger...

MUSTANG : Bandcamp, Facebook et Instagram
MUSTANG : site web officiel
David SIMONETTA : des huiles pour MUSTANG
Jo WEDIN et Jean FELZINE : site web

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Photographies : Marie PLANEILLE & Alex PILOT
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Illustrations : David SIMONETTA
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