Lame

The lame shall enter first (Alien Snatch Records) // par Lætitia Lacourt
L’Italie. Si le pays est connu pour ses pâtes, il l’est aussi pour ses soupes : il suffit de se balader un peu dans la botte pour se prendre des louches de Drupi, d’Eros Ramazzotti, d’Umberto Tozzi et autres Zucchero aussi dégoulinants qu’une assiette de mauvaises bolognaises. N’en déplaise aux ritals, force est de constater qu’au premier abord l’Italie ne se caractérise pas par une attitude rock’n’roll. Dieu soit loué, on a trouvé un peu de quoi se rassasier du côté de Florence, Milan, Rome et surtout Turin, la ville always on the move. A la simple évocation de la capitale piémontaise, notre cerveau sectaire et étriqué pense Fiat et Juventus. Un héritage quasi parfait auquel on ajoutera désormais LAME. 
LAME porte mal son nom, que l’on pourrait traduire par « boiteux », puisque le groupe a pondu l’un des meilleurs albums de 2015 dans la catégorie blues lo-fi punk. Sorti ce printemps chez Alien Snatch Records, passé un peu inaperçu, leur premier LP « The lame shall enter first » est une grosse tuerie parfaitement équilibrée de 10 titres imparables qui sentent le bar miteux, le garage crasseux et les coupe-gorge de mafieux. 
Les chiens ne faisant pas des chats, on retouve chez Lame du beau monde : Massimo Scocca, (guitare-harmonica) qui a joué dans des groupes garage dans les années 90s comme Cave Dogs et Two Bo’s Maniacs, la batteuse colombienne Maria Mallol Moya (excellente en live), et Stefano Isaia (chant-guitare) issu des géniaux Movie Star Junkies. Evidemment, une fois l’identité déclinée, vous vous doutez bien que c’est loin d’être pourri. 
10 titres donc. 10 titres qui bouclent et s’enchaînent, aussi limpides que de l’acqua della Madonna, un tracklisting parfait reflétant un univers écorché à vif, un brin nerveux où se mêlent déchéance et colère : la profondeur lancinante de Cold night, l’hymne obscur All is lost, l’intensité de la lonely ballad  All the falling leaves, la rampante et sublime Down in the valley dont les riffs, les breaks, la voix de la batteuse, les notes d’harmonica en font le joyau de l’album, la bouffe-bitume Oracle, la reprise musclée des Talking Heads Road to nowhere ou la noirceur de l’envoûtante et inquiétante  Axel  : la décadence a un son. Il est boiteux et turinois.