KEVIN MORBY

Un globe-chanteur nommé Kevin // par Lætitia Lacourt
12 juin, 12h, Paris. Le tudutt du téléphone me notifie de la réception d’un message : « Tu veux rencontrer Kevin Morby ? ».

Aussitôt, des boucles blondes tombent en cascade dans mon hémisphère droit, directement dans les départements « émotion » et « mémoire visuelle ». Un peu que je veux le rencontrer : Kevin, c’est le voyage, la vie de bohème, le vagabondage, la poésie nomade, les images surannées des sixties, les ballades pop folk mélancoliques, le romantisme, c’est le piège-à-fiiiiilles.

16 juin, 22h, Paris. Bitume chaud, ciel moite, gorge sèche : j’ai rendez-vous avec l'américain d'origine suédoise au Motel où il doit passer quelques disques. Je sirote nerveusement un verre de blanc quand Boucle d’Or se poste au bar et commande une pinte. Blond comme les blés, visage de poupon serein et joufflu, éclatant de santé, Kevin Morby devait être ce genre de mouflet à siffler ses biberons d’une traite sans moufter. Nous convenons de faire l’interview dans la rue, à l’arrache, sur le trottoir. Vu qu’il vient de passer 15 jours en France à l’exception d’un aller-retour au Portugal, il doit avoir plein de choses à nous raconter. Paris, Lille, Le Havre, Lorient, Nantes, Nîmes, Marseille, Grenoble, Limoges, Bordeaux, Toulouse, Lyon : on se demande quelle ville l’a le plus inspiré et sur quoi portera le prochain album, après New-York et L.A : chill dans les arènes de Nîmes, vie de bobo dans les quartiers montmartrois, mourir paisiblement dans une maison à colombage du Vieux Lille ou vivre de combos pastis-pétanque à Marseille ? Alors, il a kiffé quoi Kevin ? La réponse est assez claire : “Aucune ville française ne m’inspire. Pas encore. Peut-être un jour. Je dirai Toulouse. Même si pendant la tournée c’est Porto, qui n'est pas en France, qui m’a le plus inspiré ». Outre le fait que c’est mal barré pour causer tourisme, on a du mal à comprendre comment notre folkeux adoré puisse préférer la morue, les tripes et le vin muté à notre french touch. Toujours est-il que le troisième album, prévu en 2016 sur le label Dead Oceans, portera sans doute le souvenir de son escapade portugaise. Impossible d’en savoir plus, notre Kevin n’est pas très prolixe quand on l’interroge sur la continuité de sa carrière solo : « il sera similaire mais différent. Mystère... ».

En attendant, on va se contenter d’un 45 tours qui sortira le 4 septembre prochain, intitulé Moonshiner, avec le titre Bridge to Gaia (coucou Porto) en face B. Publiée dès le 12 août sur sa page facebook, Moonshiner s’inscrit dans la lignée de son dernier album et fait écho à ses pères spirituels dont il assume humblement la comparaison : « Ce n'est pas une mauvaise chose d'être comparé à eux. C'est vrai, ce sont des grosses influences pour moi ». On y retrouve une guitare sèche, un harmonica et même un peu de piano dans une ballade inspirée par le roman « Les Frères Sisters » de Patrick deWitt, un tandem de tueurs professionnels dans l’Amérique du XIXème.

Avant de le laisser s’emparer nonchalamment de la platine du Motel à coups de Nina Simone et autres Big Star, on lui arrache quand même quelques infos sur son avenir au sein de Woods et des Babies : « Je ne pense pas que je ferai de nouvelles tournées avec Woods. Si on peut encore enregistrer quelques chansons, travailler de façon collaborative, ça serait cool. J’adore faire ça. Et pour les babies, je pense qu’on peut faire encore quelque chose ensemble. Comme quelques concerts ».

Justement. La France doit quand même avoir ce petit goût de reviens-y puisque Kevin Morby sera de nouveau sur la scène du Point Ephémère le 21 septembre prochain : accueillons le encore une fois à la hauteur de son jugement : « le public français est très très bon, je l’apprécie vraiment ».