INTERVIEW Eriksson Delcroix

The belgium touch // Par Julie-Anna George
Lundi dernier j’ai eu l’honneur de rencontrer Bjorn Eriksson et Nathalie Delcroix à un moment charnière : juste avant le dernier concert de l’aventure de The Broken Circle Breakdown Bluegrass Band à l’Olympia et le début de la tournée du duo Eriksson Delcroix (qui assurait jusqu’alors la 1ère partie de TBCBBB). 

Petite remise dans le contexte : Bjorn Eriksson qui aurait pu être un cowboy des plaines Américaines est en réalité un cowboy des plaines Flamandes. C’est à lui qu’on doit la bande originale du film Alabama Monroe et qui a monté le groupe The Broken Circle Breakdown Bluegrass Band qui en a découlé. Le groupe a rencontré le succès qu’on lui connaît, en Belgique, en France, aux Pays Bas et un peu partout sur le vieux continent.

Le duo qu’il forme avec sa complice épouse Nathalie Delcroix sous le tout simple nom Eriksson Delcroix (faisant suite à The Partchesz) a assuré les 1ère parties de TBCBBB avant de prendre son indépendance pour une tournée européenne jusqu’en juin 2016. De leur duo est né l’album For Ever (qu’ils interprètent sur leur tournée 2015-2016), un écrin aux mélodies douces et mélancoliques qui peuvent faire penser à l’EP Another One de Mac Demarco mais dont la comparaison s’arrête tout de suite là. N’oublions pas que Bjorn est un cowboy bercé au country et au Bluegrass et que Nathalie a l’âme folk.

 
- Pouvez-vous vous présentez mutuellement ? :
Nathalie :
Voici Bjorn, il est né à Anvers. Il a commencé à jouer de la guitare très jeune… (Hésitation) oh mon dieu c’est dur… Son père était musicien aussi donc il a commencé a jouer de la guitare avec lui petit et c’est comme ça qu’il est devenu ce si bon guitariste je crois !... Il a été entouré de beaucoup de musiciens et à 16, non 19 ans il a été dans un groupe très connu en Belgique qui s’appel Zita Swoon. Et puis on s’est rencontré et nous avons joué de la musique ensemble et fait un groupe !
Bjorn : Et nous avons fait des enfants !
Nathalie : oui ! Nous avons fait de la musique et des enfants !
Bjorn : Voici ma femme Nathalie Delcroix. Elle chante magnifiquement. Elle a grandi dans une petite ville non loin d’Anvers. Quand elle était jeune elle n’arrêtait pas de chanter et en grandissant, elle a rencontré deux autres filles. Elles ont commencé à chanter ensemble, elles devaient avoir 16 ou 17 ans, c’est devenu un groupe de musique folk flamande (ndlr The Laïs) qui est devenu vraiment connu grâce à beaucoup de concerts et festivals. Puis nous nous sommes rencontré, tombé amoureux, monté un groupe et nous voilà ici à Paris !
 
- Alors vous êtes un couple et un duo…
Bjorn :
C’est ça un couple et un groupe !
 
- Vous avez joué hier à la Maroquinerie, comment ça c’est passé ?
Nathalie :
C’était organique ! 
Bjorn : Nous avons joué en 1ère partie puis après avec The Broken circle breakdown, nous avons fait beaucoup de concerts mais là c’était spécial, nous avons vraiment partagé avec le public. Nous étions vraiment heureux.
 
- Comment expliquez vous le succès du groupe et du bluegrass ?
Bjorn :
Le film ! Le film a eu beaucoup de succès, notamment en France avec le César. Je pense que déjà l’histoire du film a touché les gens, beaucoup de personnes se sont identifiés aux personnages. C’est une histoire de cœurs brisés et la musique qui accompagne le film correspond bien à cette histoire. Le bluegrass c’est une musique très pure. On pense que c’est une musique très américaine mais en fait c’est une musique européenne parce qu’il y a plusieurs siècles cette musique a été amenée aux Etats Unis par les immigrants. Donc quelque part on peut encore sentir que les racines sont Françaises, Irlandaises, Polonaises… C’est un mélange de musique pure et émouvante qui part des sentiments et du cœur.
Nathalie : Le film est moderne et a beaucoup plu aux jeunes gens. Il est devenu à la mode. Et là les gens se sont dit hum… Peut-être que le bluegrass est peut-être pas si mal que ça !
Bjorn : Et il a y aussi en ce moment un revival de la musique folk, la new folk, l’Acid folk etc. Les gens se retournent aussi beaucoup vers la musique plus acoustique.
 
- Votre musique est très nostalgique tournée vers l’âme, la foi, les sentiments… Etes-vous des personnes nostalgiques ou mélancoliques ?
Nathalie :
Je pense, peut-être.
Bjorn : Notre musique est un mélange. Elle est émotionnelle et parle d’amour, de religion et de mélancolie mais avec le groupe nous y mettons de l’énergie et nous essayons de créer de nouvelles choses, de nouveaux sons pas seulement tournés vers le passé. Il y a aussi quelque chose de très festif dans le groupe.
 
- J’ai lu quelque part que vous aviez eu un passé punk et que vous étiez entre autres fan de Nick Cave, que reste-t-il de votre passé punk ?
Bjorn :
Ce n’est pas vraiment du passé ! Ce n’est pas parce que je fais du bluegrass que je ne suis pas intéressé par d’autres genres. Nous sommes vraiment très ouverts. Nous écoutons par exemple de l’éléctro.
Nathalie : Nous faisons de l’éléctro !
Bjorn : Nous faisons du bluegrass et de la country parce que ça nous va bien. C’est le genre musical parfait pour que nous chantions en harmonie et nous aimons ça mais nous pourrions faire un tout autre genre de musique. Mais c’est vrai que j’ai grandi avec la musique country que mon père m’a transmise (ndlr le père de Bjorn est aussi musicien et un des meilleurs joueurs de Banjo d’Europe), donc c’est une musique qui me vient du fond du cœur. Mais on fait aussi d’autres choses, on organise des techno party (rires) !
Nathalie : Je crois que parfois on fait vraiment des trucs supers bizarres et que les gens doivent se dire « mais c’est ceux qui font que la country ?! ». Mais je pense vraiment qu’il est aussi intéressant de tester d’autres trucs.
 
- J’aime particulièrement votre morceau Walking et son clip qui l’accompagne, pouvez vous nous raconter la genèse du morceau jusqu’à la réalisation de la vidéo ?
Bjorn :
Pour Walking par exemple l’album For Ever était déjà fini et la chanson n’aurait pas dû y figurer. Et puis je me suis dis qu’il pourrait encore il y a avoir un titre mais quelque chose d’un peu différent du reste. Alors j’ai utilisé quelques accords d’une autre chanson que j’avais composée mais jamais utilisée. Donc j’ai commencé à bidouiller quelques trucs sur mon ordinateur et puis je me suis mis à chanter dessus une mélodie. Et puis j’ai demandé à la fille ainée de Nathalie qui à 17 ans ce qu’elle en pensait. Si c’était « catchy », et puis elle m’a orienté ! Elle a 17 ans et est devenue comme mon producteur pour ce morceau ! Et puis c’est elle qui s’est mise à chanter la mélodie du morceau. Et ça m’a convaincu de mettre le morceau dans l’album.
Nathalie : Et les paroles sont à propos de nous mais aussi à propos des filles (Ndlr Bjorn à également une fille ainée de 21 ans).  Et pour le clip on l’a simplement fait dans notre cuisine ! Tous les jours, au milieu de notre vie normale on se mettait à se filmer un peu de Walking ! On a juste voulu faire quelque chose de très intimiste.
 
- Alors vous écrivez d’abord la musique et ensuite les paroles ?
Bjorn :
Oui le plus souvent je commence parce jouer quelque chose, puis j’écrit la musique et ensuite je construit une histoire sur le morceau et c’est la que les paroles naissent.
 
- Avez-vous une musique dans la tête que vous essayez de faire ou c’est plus improvisé ?
Bjorn :
J’ai toujours ma guitare, même le matin et je joue en fait tout le temps donc parfois de bons sons sortent. On a aussi un mini studio au fond du jardin qui me permet de tester beaucoup de chose.
Nathalie : Il y part le matin et revient le soir avec deux ou trois nouveaux morceaux. C’est comme si il partait et revenait du bureau !
 
- Pensez vous qu’il existe une « Belgium Touch »? Parce que beaucoup de groupes belges marchent vraiment très bien à l’international et notamment en France !
Bjorn :
Ouais, bon on ne le voit pas vraiment mais c’est vrai que lorsque l'on fait écouter notre musique à d’autres gens, des Français par exemple, ils nous disent « Yeah ça sonne Belge ! ». Mais on ne sait pas vraiment ce que ça veut dire, parce si tu écoutes de la musique de la musique belge même des sixties ou jazz il n’y a rien de vraiment belge ! Tu ne peux pas dire que c’est belge.
Mais en fait je pense que ce qui peut faire la « Belgium Touch » c’est une sorte de mélancolie, même dans la pop-rock musique Belge. Oui la mélancolie doit être typiquement belge ! Je pense que c’est dû au climat !
Nathalie : haha peut-être le temps c’est ça !
 
- Mais il y aussi une culture rock en Belgique, non ?
Nathalie :
Oui je pense que notre pays est rock’n’roll. Les bars ne ferment pas à deux heures. Tu peux sortir comme tu veux !
 
- Ce soir vous allez jouer à L’Olympia, comment appréhendez vous cette date ?
Nathalie :
On va vraiment profitez ce soir parce c’est la dernière date dans cette configuration.
Bjorn : Oui on va profitez à fond parce que c’est la dernière date du Broken Circle Breakdown Bluegrass Band !
Nathalie : Pour le moment je ne suis pas stressée mais peut-être que ce soir avant de monter sur scène je serais un peu nerveuse.
 
- Et la vie de tournée, comment vous la vivez ?
Nathalie :
C’est un plaisir ! Mais c’est vrai que parfois quand tu as des enfants c’est moins simple.
Bjorn : Nous tournons beaucoup en Belgique donc ce n’est jamais trop loin de la maison. On peut même rentrer chez nous le soir ! Mais par contre on peut avoir cinq concerts dans la semaine donc c’est intense mais on est comme une famille avec le groupe. Moi par exemple, mon père joue dans le groupe, mon meilleur ami aussi. Avec certains on se connaît depuis vingt ans donc c’est un plaisir d’être sur la route.
Nathalie : Ce n’est pas comme un travail, c’est notre passion.
Bjorn : Là avec Eriksson Delcroix on va faire un tour de France !
 
- Sur scène vous avez un look très country vous êtes comme ça dans la vie en fait !
Nathalie :
oui !
Bjorn : Sur scène on est nous.
Nathalie : Ce ne sont pas vraiment des costumes parce que nous ne jouons pas des personnages.