Gun Club

"Danse Kalinda Boom" - Live in Pandora's box (Bang Records 2016) // Par Buddy Drongo - Translation by Ugo Martinez
   La boîte de Pandore

    Quiconque ayant déjà pu jeter un oeil voire les deux aux vidéos trainant de-ci de-là sur la toile de ce bon vieux Jeffrey assis sur son tabouret brillant d'un feu humide, ne pourra rétorquer sans y réfléchir à deux fois que cet homme était sans aucun doute un des rares sinon le seul qui incarnait le mieux le son et l'esprit du blues parmi les blancs, ainsi que parmi la majorité des noirs toutes générations confondues dont l'âme avait été aspirée non par le diable mais par le music business itself et la sénilité précoce, son corollaire. Il y eut bien-entendu un déclin musical (là encore le débat reste vif) mais celui-ci contribua grandement à la légende du personnage.

    Président du fan club du fantôme de Jeffrey Lee Pierce auto-proclamé, j'invite tous ceux qui liront ces lignes à venir dialoguer et à m'offrir leur point de vue s'ils le souhaitent. 

    La culture, Jeffrey, t'aura donné quelques années de rab. Ton amour de la littérature, des voyages, des arts martiaux, ta quête incessante de voir si tu n'étais pas là où tu n'étais pas, toujours à traquer le fantôme qui te possédait et dont tu avais fait sujet de choix d'un bon nombre de tes chansons. Lorsque sorti ce «Danse Kalinda Boom» en 1985 titre remanié en l'honneur du ritualiste voodoo Dr John et pioché sur l'album «Gris Gris», sonna quelque part pour toi à l'aube de tes vingt-sept ans le glas de ta jeunesse. Il faut dire que les exemples à charge sont bien trop nombreux. En moins de cinq ans, une trilogie d'albums touchant aux nues et un EP « Death Party » à la puissance incantatoire dont on ne peut difficilement revenir. « N'invoque pas ce que tu ne peux repousser » disait le proverbe. «Mother Juno» balancera les derniers restes plus ou moins digestes de ce sacrifice cannibale que fut ta vie, l'ami. Tant de bouches à nourrir que celles de tes héros Hank, Robert, Jim et toutes les autres ombres qui se bousculaient sans répit à ta cantine. « On y mange bien ! » pouvons-nous encore entendre à l'heure actuelle dans le couloir de la mort.

    Alors il y a ce live à la boîte de Pandore, dans ta Hollande d'adoption, sorti sur le label Megadisc responsable à l'époque de la promotion d'une gamme indé tout ce qu'il y a de plus sympathique allant de Jonathan Richman à Cocteau Twins en passant par les Smiths et les Pixies le tout chapeauté par le sacro-saint Rough Trade. 

    Aujourd'hui réédité chez les Basques enragés de Bang! Records, la fougue légendaire du Gun Club est ici saisie comme il se doit dans toute sa lumineuse brutalité. La captation que certains s'empresseront de qualifier de lo-fi restitue avec clarté pour peu que l'on s'y penche tout le spectre des fluctuations énergétiques du plateau et l'auditeur d'être plongé dans la salle, dans cet espace que révèle cette réverbération naturelle qui n'est que fausse distance et qui l'invite au contraire à faire l'effort d'entrer, à son gré et non à lui violer la trompe d'eustache avec les instruments en dur bien compressés. Libre à lui de rejoindre la cérémonie. Libre à lui de s'unir. Mention spéciale à «Sleeping in Blood City» pour la bestialité du coït, alliance sacrée de la crème du Hardcore de Los Angeles et du rockabilly : en somme un psychobilly expurgatoire des premières heures dont les cris ne cesseront d'inspirer la catharsis de la marmaille en devenir. Une fois le pas franchi, rien ne vous arrêtera excepté la fin du disque où vous serez violemment projeté dans le silence de votre salon oubliant l'époque dans laquelle vous êtes sensé vous situer. Peut-être alors pour vous le temps ne sera plus qu'un lointain souvenir et le sentiment de vérité dans l'expérience sera-t-il désormais votre unique valeur de référence. Il vous sera utile à ce moment là de vous remémorer cette histoire de Jules Vernes où voit le jour à la fin de la guerre de Sécession un Club d'Armes désireux de s'envoler vers la lune.

    Tour à tour passeur et passager à l'instar d'un John Fogerty dont la reprise de «Back through the jungle» figure sur l'album Miami, Sir Pierce est un puits de symbolisation imaginative, une montagne d'évocation à lui tout seul nous contant comme un fugitif l'âge d'or d'une Amérique fantasmée, rêvant les tribulations des explorateurs en mer d'orient, des fétiches plein les valises. Chez Joseph Conrad, Jim (l'alter-ego de Pierce) était celui qui voulait être brave, devenir quelqu'un dans le feu de l'aventure, un héros potentiel condamner à racheter sa faute, à réparer sa lâcheté, troublé sans relâche par un monde qui semble se jouer de lui et finalement anéanti par des choix malheureux. En définitive, le Marlon Brando du Blues-punk aura tiré sa révérence en reclus, fidèle à son père spirituel entouré de son sabre et de sa guitare. Suite à une brouille de l'acteur fétiche de « L'équipée sauvage » avec la production, Val Kilmer ayant lui-même joué Jeffrey Lee Pierce dans le film d'Oliver Stone sur les Doors sorti en 1987, il proposera son ami dans la suite d' « Apocalypse Now ». Sorti en 1996, année de son décès, « L'île du Docteur Monroe » sera le premier et dernier grand rôle de Jeffrey au cinéma.
Paix à ton âme, dude.

------------ Translation by Ugo Martinez --------------------------

The Pandora box
   
    Anyone that ever had a look at videos creeping around the web of this good ol’ Jeffrey sitting on his shiny stool, would not say without thinking twice this man was beyond any doubt one of the rare or maybe the only one to personify the sound  and the spirit of blues within the white comunity as he did, but also wihtin the black comunity and that all generations mixed up, the ones that didn’t sold their souls to the devil but to the music industry itself and early senility, his crown. There was obviously a decay within his music (the debate is still lively) but then again this built on his legend.

    As self-proclaimed President of the fan club of Jeffrey Lee Pierce’s ghost, i invite the ones that will read those ligns to come and talk and offer me their point of view if they want to.

    Culture, Jeffrey, gave you a little more time. Your love for literature, travels, martial arts, this incessant quest to see if you weren’t where you weren’t, always tracking the ghost that possessed you and which you had made the subject of many songs of yours. When this « Danse Kalinda Boom » came out in 1985, song reworked in the honnor of the voodoo priest Dr John taken from the « Gris Gris » album, it rung somewhere for you at the dawn of your 27th birthday, ending your youth. It’s fair to say, exemples are far too numbered to be counted. In less then 5 years, a trilogy of moving albums and one EP « Death Party » with its power of incantation which you can’t easily come back from. « Do not invoke what you cannot repel » says the french proverb. « Mother Juno » threw the last pieces more or less digest of this cannibale sacrifice that was your life, friend.  So many mouths to feed with all of your heroes Hank, Robert, Jim and all the other shadows that were rushing to your canteen. « Good place to eat ! » is what we still can hear today in the death row.

    So there is this live at the Pandora box, in Holland your land of adoption, that came out on the label Megadisc reponsible at that time of the promotion of a great bunch with the likes of Jonathan Richman to Cocteau Twins and The Smiths and The Pixies and all of that supervised by the sacrosanct Rough Trade.

    Today re-edited by the enraged Basques from Bang ! Records, the legendary ardour of The Gun Club is here seized just as it should be in all its blazing brutality. The recording of the live that some will call lo-fi reflect with great clarity for if you mesure the spectrum of fluctuations on the stage and imagine being a listener in the crowd, in that space that reveal a natuarl reverb which only is a false distance that invites you and pushes you to make the effort to get in, withtout being agressed by the intruments and the compression of the sound. Feel free you join the ceremony. Feel free to unify. Special mention to « Sleeping in Blood City » for the bestiality of the coitus, the sacred alliance between the cream of Los Angeles’s Hardcore scene and Rockabilly : in other words psychobilly of the first hours in which the screams will never stop inspiring the new generations. Once the first step’s passed , nothing will stop you until you reach the end of the album where you’ll be violently thrown into the silence of your empty living room forgeting about the time and space in which you are suposed to be living in. Then maybe time will seems to you a distant memory and the feeling of truth within the experience will then be your unique point of view. Then you might find handy to remember that novel from Jules Vernes where a gun club wish to fly to the moon.

    Time after time smugler then passenger in contrast to John Fogerty whose cover of « back through the jungle » feature on the Miami album, Sir Pierce is a fount of symbolized imaginary, a mountain of memories all by himself like a fugitive in the golden times of america, dreaming the tribulations of travelers on oriental seas, their bags full of mascots.
In Joseph Conrad , Jim ( the alter - ego of Pierce) was the one who wanted to be brave, be someone in the fire of adventure, a potential hero condemned to redeem his fault, repair his cowardice, troubled tirelessly a world that seems to play him and finally destroyed by the unfortunate choice. Ultimately, the Marlon Brando of Blues punk has bowed out in seclusion, true to his spiritual father surrounded by his sword and his guitar. After a falling out of the favorite actor of " The Wild " with production, Val Kilmer who himself played Jeffrey Lee Pierce in the Oliver Stone film about The Doors released in 1987 , it will offer his friend in result of " Apocalypse Now." Released in 1996, the year of his death, "The Island of Dr. Monroe " will be the first and last great role of Jeffrey cinema.
Rest your soul, dude.