Colorado (Warner Bros., 2019) // Par Eric F
A 74 ans et (probablement) toutes ses dents, Neil Young s’est enfin décidé à remonter son fidèle cheval fou, sept ans après le gargantuesque double album Psychedelic Pill, cavalcade effrénée qui avait pourtant tout d’un magnifique testament pour Young et son backing band historique, autoproclamé « troisième meilleur groupe garage au monde ».
Ça n’est pas pour autant qu’Uncle Neil se sera fait discret entre 2012 et aujourd’hui, attachez votre ceinture : il aura notamment poursuivi son exploration de ses monumentales archives via la sortie de lives impeccables et la mise en ligne d’un site dédié à l’intégralité de ses enregistrements, proposés en haute qualité audio. Sans oublier de déverser de l’acide sur le format mp3 aussi souvent que possible, tout en faisant un four commercial avec le Pono, son alternative audio hq (un livre cosigné avec Phil Baker est récemment sorti sur le sujet). Il aura également divorcé de sa femme Peggi Young, décédée en janvier 2019, avant de perdre son manager de longue date Elliott Roberts quelques mois plus tard. Avant cela, Young s’était remarié avec l’actrice et réalisatrice Darryl Hannah, rêve mouillé de plus d’un adolescent américain dans les 80s (cf. son rôle de sirène dans Splash en 1984). Il a aussi entamé une relation, beaucoup plus professionnelle, avec les fils de Willie Nelson et leur groupe Promise of the Real, alternant le bon et l’anecdotique. Comme un symbole de la discographie du Loner, alternant entre des périodes de grâce intouchable et d’expérimentations plus ou moins justifiables et réussies. « Les gens de mon âge, ils ne font pas les choses que je fais » clamait Neil Young sur I’m The Ocean, tiré de Mirror Ball, l’album enregistré avec Pearl Jam… Tu m’étonnes !
Le canadien a donc remis le pied à l’étrier avec sa fidèle monture il y a quelques mois via une mini-tournée quasi inopinée dans son pays natal. Quelques concerts qui auront suffi en guise de bizutage pour Nils Lofgren (Bruce Springsteen & the E Street Band) qui remplace à la guitare le démissionnaire Frank « Pancho » Sampedro. Un retour aux sources pour le guitariste aux chapeaux improbables puisqu’il avait officié sur After The Gold Rush en 1975. S’il a suffi de quelques vidéos live capturées sur ces concerts pour s’assurer de la complémentarité entre Young et son ancien-nouveau guitariste, on pouvait toutefois se demander si le Crazy Horse n’allait pas un peu perdre en fougue et spontanéité avec le départ de Sampedro.
Premier élément de réponse avec la tracklist de Colorado, plus compacte que son prédécesseur. Il faut dire que celui-ci chiffrait déjà une heure avec ses trois morceaux phares (Driftin’ Back, Ramada Inn et l’immense Walk Like A Giant). On n’atteindra que 50 minutes cette fois-ci, et l’épique She Showed Me Love qui s’étire sur presque un quart d’heure fera figure d’exception. Fruit de sessions studio enregistrées à Telluride, perché à 2667 mètres d’altitude, Colorado ne nous donne pas pour autant à entendre un Loner à bout de souffle, lui qui avait justement prévu de nombreux masques à oxygène pour l’occasion.
Première surprise d’entrée avec ce Think Of Me acoustique, qui n’aurait pas fait tâche sur Silver & Gold ou Harvest Moon. « Quand tu verras les oies dans le ciel, pense à moi / Je peux déployer mes ailes et m’envoler comme elles / Et je peux galoper dans ta prairie ouverte / Et plonger sous ta mer la plus profonde / Pense à moi » … Young nous accueille sans chichis au coin du feu, et on a tout de suite l’impression d’avoir retrouvé un très vieil ami. De la simplicité et de la concision pendant que le fidèle backing band rassure, les harmonies vocales de Bill Talbot (basse) et Ralph Molina (batterie) faisant encore des merveilles.
L’impression de familiarité se confirmera sur She Showed Me Love, qui sonne quant à lui comme du Neil Young & Crazy Horse pur jus. Bien qu’il fasse autant écho à Down By The River que l’intro de When You Dance I Can Really Love, le morceau ne se hissera pas au niveau de ses ainés. Mais ça ne sera pas faute d’avoir essayé, le quatuor nous rappelant encore une fois son aisance pour se perdre au milieu de ses propres morceaux, survivant en semant quelques cailloux électriques tout au long de son chemin. Neil Young est pourtant quelque peu en roue libre avec ses textes et une voix encore plus (d)éraillée que d’habitude. Ce qui ne manquait pas de charme par le passé, mais souligne désormais ici la faiblesse des paroles. On n’ira bien sûr pas reprocher au canadien d’écrire de nouveaux manifestes écolos, lui qui s’y emploie depuis près de quarante ans. Mais se contenter de simplistes « J’ai vu des vieux blancs tenter d’assassiner dame natuuuuuuuuuuuuuure » nous laissera quelque peu sur notre faim, malgré une intro qui laissait présager du meilleur.
Pas vraiment taillé pour durer aussi longtemps, She Showed Me Love laisse une impression de verre à moitié plein/vide. D’où le retour des inquiétudes quant à l’absence de Frank Sampedro, à qui il ne fallait pas demander deux fois de tenir la barraque pendant que la mythique Les Paul noire du patron partait dans des embardées vers l’infini et au-delà.
Qu’à cela ne tienne, Neil Young nous aura par les sentiments sur Olden Days, belle complainte désabusée à l’électricité statique sur le temps qui passe et les amis qui partent, forcément trop tôt : « Je revis les jours anciens / J’ai retrouvé mes amis le long du chemin / Certains sont avec moi en ce moment même / Certains ont disparu / Où sont-ils tous passés ? / Pourquoi ont-ils disparu loin de moi ? ». Indéniablement cathartique, le morceau voit Young révéler ses fêlures sans faux détours, un domaine dans lequel il excelle depuis fort longtemps (Tonight’s The Night, On The Beach, Sleeps With Angels).
Help Me Lose My Mind prend le contre-pied de She Showed Me Love en livrant une version à la fois concise et puissante du Crazy Horse. Ici, pas de solos qui dépassent une durée raisonnable, mais un riff simple et lourd. Histoire de reposer ses cordes vocales passablement éreintées, Young opte pour un phrasé presque hip-hop plutôt efficace. Billy Talbot donne quant à lui tout ce qu’il a sur ses chœurs : les images de l’enregistrement du morceau disponible sur Youtube nous laisseraient d’ailleurs le croire au bord de l’apoplexie. C’est encore une fois l’occasion de souligner que le Crazy Horse ne triche jamais et à quel point la somme de ses individualités dépasse largement leurs qualités intrinsèques.
Shut It Down tente également la même approche, mais se fera moins efficace, la faute une nouvelle fois à des paroles peu inspirées et des riffs un peu balourds. Pas de panique, c’est le seul morceau vraiment raté de l’album. On le pardonnera bien vite à l’écoute des apaisants Green Is Blue, Eternity et surtout Milky Way qui prennent un parti pris beaucoup plus minimaliste et intime. Le bien nommé Milky Way fait référence aux morceaux les plus brumeux de Sleeps With Angels, autre disque enregistré suite au décès d’un proche célèbre (Kurt Cobain). Oui, Neil Young peut très bien se passer de distorsion quand il joue en mode électrique, merci pour lui, ses solos sont ici d’une magnifique douceur cotonneuse.
Si Colorado a pour thème centraux les ravages du temps qui passe et la désespérante situation climatique planétaire (impossible de passer à côté tant il l’évoque en large et en travers), Neil Young n’oublie pas pour autant de coller un bon caramel à l’administration Trump (sans jamais la nommer) au sujet du mur le temps de Rainbow of Colors : « Il y a un arc en ciel de couleurs dans cette bonne vieille Amérique / Personne ne va blanchir ces couleurs ». Véritable hymne humaniste qui n’apporte rien de nouveau au répertoire de Crazy Horse mais le fait avec brio, Rainbow Of Colors évite facilement la sortie de route comme Let’s Roll avait pu le faire en évoquant très maladroitement le 11 septembre.
Le quinzième album de Neil Young & Crazy Horse se referme sur un nouveau morceau acoustique, le sublime I Do, qui oppose un optimisme climatique presque incongru (« Je sais que tu dis que les animaux ne disparaitront pas / Je sais que tu n’es pas inquiet et que tu t’en soucies / Et je sais que tu te poses les mêmes questions que moi ») à un simple « Pourquoi est-ce que je crois en toi ? ». Contrairement à ses habitudes vindicatives, Neil Young pointe beaucoup moins du doigt les responsables du désastre, pile au moment où il devrait nous sortir « Je vous l’avais bien dit ! ».
Mais quiconque suit la carrière de Neil Young sait que le canadien fera exactement ce qui lui chante jusqu’à la fin, surtout s’il s’agit de prendre un nouveau contre-pied. Et si certains ne manqueront probablement pas de déjà regretter Psychedelic Pill (son dernier grand disque ?), Neil Young a néanmoins tenté (et globalement) réussi le pari d’imposer son Crazy Horse comme le meilleur véhicule pour des chansons douces-amères, globalement moins chargées en électricité qu’à l’accoutumée. Les inconditionnels du Crazy Horse vieille école se consoleront avec l’annonce de la sortie plus ou moins imminente de l’album live Alchemy, enregistré en Australie sur la tournée du même nom en 2013. Celui-ci s’annonce d’ores et déjà comme un parfait témoignage de la puissance de feu de Neil Young & Crazy Horse, à ranger aux côtés de Live Rust et Weld.
Neil Young & Crazy Horse ? Long may they run.
Ça n’est pas pour autant qu’Uncle Neil se sera fait discret entre 2012 et aujourd’hui, attachez votre ceinture : il aura notamment poursuivi son exploration de ses monumentales archives via la sortie de lives impeccables et la mise en ligne d’un site dédié à l’intégralité de ses enregistrements, proposés en haute qualité audio. Sans oublier de déverser de l’acide sur le format mp3 aussi souvent que possible, tout en faisant un four commercial avec le Pono, son alternative audio hq (un livre cosigné avec Phil Baker est récemment sorti sur le sujet). Il aura également divorcé de sa femme Peggi Young, décédée en janvier 2019, avant de perdre son manager de longue date Elliott Roberts quelques mois plus tard. Avant cela, Young s’était remarié avec l’actrice et réalisatrice Darryl Hannah, rêve mouillé de plus d’un adolescent américain dans les 80s (cf. son rôle de sirène dans Splash en 1984). Il a aussi entamé une relation, beaucoup plus professionnelle, avec les fils de Willie Nelson et leur groupe Promise of the Real, alternant le bon et l’anecdotique. Comme un symbole de la discographie du Loner, alternant entre des périodes de grâce intouchable et d’expérimentations plus ou moins justifiables et réussies. « Les gens de mon âge, ils ne font pas les choses que je fais » clamait Neil Young sur I’m The Ocean, tiré de Mirror Ball, l’album enregistré avec Pearl Jam… Tu m’étonnes !
Le canadien a donc remis le pied à l’étrier avec sa fidèle monture il y a quelques mois via une mini-tournée quasi inopinée dans son pays natal. Quelques concerts qui auront suffi en guise de bizutage pour Nils Lofgren (Bruce Springsteen & the E Street Band) qui remplace à la guitare le démissionnaire Frank « Pancho » Sampedro. Un retour aux sources pour le guitariste aux chapeaux improbables puisqu’il avait officié sur After The Gold Rush en 1975. S’il a suffi de quelques vidéos live capturées sur ces concerts pour s’assurer de la complémentarité entre Young et son ancien-nouveau guitariste, on pouvait toutefois se demander si le Crazy Horse n’allait pas un peu perdre en fougue et spontanéité avec le départ de Sampedro.
Premier élément de réponse avec la tracklist de Colorado, plus compacte que son prédécesseur. Il faut dire que celui-ci chiffrait déjà une heure avec ses trois morceaux phares (Driftin’ Back, Ramada Inn et l’immense Walk Like A Giant). On n’atteindra que 50 minutes cette fois-ci, et l’épique She Showed Me Love qui s’étire sur presque un quart d’heure fera figure d’exception. Fruit de sessions studio enregistrées à Telluride, perché à 2667 mètres d’altitude, Colorado ne nous donne pas pour autant à entendre un Loner à bout de souffle, lui qui avait justement prévu de nombreux masques à oxygène pour l’occasion.
Première surprise d’entrée avec ce Think Of Me acoustique, qui n’aurait pas fait tâche sur Silver & Gold ou Harvest Moon. « Quand tu verras les oies dans le ciel, pense à moi / Je peux déployer mes ailes et m’envoler comme elles / Et je peux galoper dans ta prairie ouverte / Et plonger sous ta mer la plus profonde / Pense à moi » … Young nous accueille sans chichis au coin du feu, et on a tout de suite l’impression d’avoir retrouvé un très vieil ami. De la simplicité et de la concision pendant que le fidèle backing band rassure, les harmonies vocales de Bill Talbot (basse) et Ralph Molina (batterie) faisant encore des merveilles.
L’impression de familiarité se confirmera sur She Showed Me Love, qui sonne quant à lui comme du Neil Young & Crazy Horse pur jus. Bien qu’il fasse autant écho à Down By The River que l’intro de When You Dance I Can Really Love, le morceau ne se hissera pas au niveau de ses ainés. Mais ça ne sera pas faute d’avoir essayé, le quatuor nous rappelant encore une fois son aisance pour se perdre au milieu de ses propres morceaux, survivant en semant quelques cailloux électriques tout au long de son chemin. Neil Young est pourtant quelque peu en roue libre avec ses textes et une voix encore plus (d)éraillée que d’habitude. Ce qui ne manquait pas de charme par le passé, mais souligne désormais ici la faiblesse des paroles. On n’ira bien sûr pas reprocher au canadien d’écrire de nouveaux manifestes écolos, lui qui s’y emploie depuis près de quarante ans. Mais se contenter de simplistes « J’ai vu des vieux blancs tenter d’assassiner dame natuuuuuuuuuuuuuure » nous laissera quelque peu sur notre faim, malgré une intro qui laissait présager du meilleur.
Pas vraiment taillé pour durer aussi longtemps, She Showed Me Love laisse une impression de verre à moitié plein/vide. D’où le retour des inquiétudes quant à l’absence de Frank Sampedro, à qui il ne fallait pas demander deux fois de tenir la barraque pendant que la mythique Les Paul noire du patron partait dans des embardées vers l’infini et au-delà.
Qu’à cela ne tienne, Neil Young nous aura par les sentiments sur Olden Days, belle complainte désabusée à l’électricité statique sur le temps qui passe et les amis qui partent, forcément trop tôt : « Je revis les jours anciens / J’ai retrouvé mes amis le long du chemin / Certains sont avec moi en ce moment même / Certains ont disparu / Où sont-ils tous passés ? / Pourquoi ont-ils disparu loin de moi ? ». Indéniablement cathartique, le morceau voit Young révéler ses fêlures sans faux détours, un domaine dans lequel il excelle depuis fort longtemps (Tonight’s The Night, On The Beach, Sleeps With Angels).
Help Me Lose My Mind prend le contre-pied de She Showed Me Love en livrant une version à la fois concise et puissante du Crazy Horse. Ici, pas de solos qui dépassent une durée raisonnable, mais un riff simple et lourd. Histoire de reposer ses cordes vocales passablement éreintées, Young opte pour un phrasé presque hip-hop plutôt efficace. Billy Talbot donne quant à lui tout ce qu’il a sur ses chœurs : les images de l’enregistrement du morceau disponible sur Youtube nous laisseraient d’ailleurs le croire au bord de l’apoplexie. C’est encore une fois l’occasion de souligner que le Crazy Horse ne triche jamais et à quel point la somme de ses individualités dépasse largement leurs qualités intrinsèques.
Shut It Down tente également la même approche, mais se fera moins efficace, la faute une nouvelle fois à des paroles peu inspirées et des riffs un peu balourds. Pas de panique, c’est le seul morceau vraiment raté de l’album. On le pardonnera bien vite à l’écoute des apaisants Green Is Blue, Eternity et surtout Milky Way qui prennent un parti pris beaucoup plus minimaliste et intime. Le bien nommé Milky Way fait référence aux morceaux les plus brumeux de Sleeps With Angels, autre disque enregistré suite au décès d’un proche célèbre (Kurt Cobain). Oui, Neil Young peut très bien se passer de distorsion quand il joue en mode électrique, merci pour lui, ses solos sont ici d’une magnifique douceur cotonneuse.
Si Colorado a pour thème centraux les ravages du temps qui passe et la désespérante situation climatique planétaire (impossible de passer à côté tant il l’évoque en large et en travers), Neil Young n’oublie pas pour autant de coller un bon caramel à l’administration Trump (sans jamais la nommer) au sujet du mur le temps de Rainbow of Colors : « Il y a un arc en ciel de couleurs dans cette bonne vieille Amérique / Personne ne va blanchir ces couleurs ». Véritable hymne humaniste qui n’apporte rien de nouveau au répertoire de Crazy Horse mais le fait avec brio, Rainbow Of Colors évite facilement la sortie de route comme Let’s Roll avait pu le faire en évoquant très maladroitement le 11 septembre.
Le quinzième album de Neil Young & Crazy Horse se referme sur un nouveau morceau acoustique, le sublime I Do, qui oppose un optimisme climatique presque incongru (« Je sais que tu dis que les animaux ne disparaitront pas / Je sais que tu n’es pas inquiet et que tu t’en soucies / Et je sais que tu te poses les mêmes questions que moi ») à un simple « Pourquoi est-ce que je crois en toi ? ». Contrairement à ses habitudes vindicatives, Neil Young pointe beaucoup moins du doigt les responsables du désastre, pile au moment où il devrait nous sortir « Je vous l’avais bien dit ! ».
Mais quiconque suit la carrière de Neil Young sait que le canadien fera exactement ce qui lui chante jusqu’à la fin, surtout s’il s’agit de prendre un nouveau contre-pied. Et si certains ne manqueront probablement pas de déjà regretter Psychedelic Pill (son dernier grand disque ?), Neil Young a néanmoins tenté (et globalement) réussi le pari d’imposer son Crazy Horse comme le meilleur véhicule pour des chansons douces-amères, globalement moins chargées en électricité qu’à l’accoutumée. Les inconditionnels du Crazy Horse vieille école se consoleront avec l’annonce de la sortie plus ou moins imminente de l’album live Alchemy, enregistré en Australie sur la tournée du même nom en 2013. Celui-ci s’annonce d’ores et déjà comme un parfait témoignage de la puissance de feu de Neil Young & Crazy Horse, à ranger aux côtés de Live Rust et Weld.
Neil Young & Crazy Horse ? Long may they run.