Viens Mourir (Teenage Menopause Records) // Anton Schaefer
Nous faisons face aujourd'hui à un paradoxe entre l'avènement de musiques inoffensives (insérez ici n'importe quel groupe d'electro-pop hédoniste en toc) et un monde brutal rythmé par les vidéos de décapitations de Daesh et les crashs d'avions. La culture du cool a gagné : ce qui donne un mainstream non ancré dans le réel et représentant une sorte de rêve chic et fake dans lequel les nouvelles icones divines sont Kanye West et Kim Kardashian. En opposition à des artistes devenus plus complaisants que dérangeants, Ventre De Biche fait partie des insurgés, produisant de la musique punk avec des synthés : des chansons pouilleuses, provocatrices, bouleversantes. Et si les héritiers légitimes des Béruriers Noirs étaient les punks à synths ?
Quelle est la genèse de ton projet, Ventre de Biche ?
Bah écoute, ça a commencé j'étais nouveau à Strasbourg. Je ne connaissais pas encore trop de gens pour faire de la musique, et du coup cela m'ennuyait, j'ai commencé à faire de la musique tout seul. Et j'ai passé pas mal de temps à essayer de trouver une formule, où j'arrivais à faire les mêmes morceaux en l'enregistrement qu'en concert, à peu près. Au début, je tatonnais : du coup je faisais une piste de batterie, un peu de guitare... Enfin des trucs impossibles à rejouer tout seul en concert. Du coup, quand j'ai repensé à ce vieux synthé qui trainait chez moi, c'était l'idéal en fait pour pouvoir tourner simplement, tout seul, en train. Cela me permettait de faire des tournées assez facilement, tout seul, sans avoir rien à demander, je pouvais juste prendre mon sac à dos, avec mon synthé dedans, c'est pratique.
C'est à peu près le même raisonnement que l'on peut retrouver chez des gars comme Jessica93 ou bien Scorpion Violente, cette recherche d'un moyen assez simple et direct afin de ne pas se prendre la tête pour tourner...
Il y a des contraintes à ne devoir utiliser au final qu'assez peu d'outils. Mais c'est pas mal d'essayer d'en faire le plus possible avec un truc assez minimal. Cela permet de cadrer pas mal le truc, c'est plutôt agréable
D'où vient le titre de cet album, « Viens Mourir » ?
En fait, c'est le titre d'un morceau que je ne joue plus. C'est un genre de slogan, une sorte de grosse blague négative.
Le genre de blague négative que l'on trouve beaucoup chez les artistes de La Grande Triple Alliance Internationale de l’Est dont tu fais partie ; est ce que tu peux nous parler de ce rassemblement ?
Cela existait bien avant que j'en fasse partie. Je l'ai découvert quand j'habitais encore à Lyon, avant de les connaitre personnellement. Et c'est sûr qu'il y a pas mal de groupes de chez eux qui m'ont bien décomplexé par rapport à pas mal de trucs, du genre ne plus trop se poser la question du style de musique que tu joues et chanter dans la langue que tu veux. C'était un grand soulagement pour moi de découvrir que tout est valable.
Tu chantes en français sur cet album, est ce que tu trouves qu'il est difficile de faire sonner la langue française ?
Je pense que c'est un pli qui se prend. Après, je pense qu'il est plus facile d'être précis dans une langue que tu maîtrises bien. Et des textes, j'en écris beaucoup plus que j'en chante, parce qu'il y en a plein que je trouve assez pourris. Il faut pas trop se poser de questions, faut écrire et puis voir après ce que tu gardes.
Ton album "Viens Mourir" sort chez Teenage Menopause Records ; comment s’est faite la connexion entre toi et Teenage Menopause ?
Par le biais de Froos, un des deux gars du label, celui qui habite à Paris, l'autre habitant à Bruxelles. Cela fait deux ans que l'on se croise assez régulièrement à des concerts, on a beaucoup discuté. Il a l'air d'être un mec assez curieux, bien à fond, et puis ça s'est fait par goûts musicaux.
Quelles sont tes influences musicales pour ce projet en particulier ?
J'aime bien les musiques assez répétitives en fait, peu importe le style. D'ailleurs, je pense que cela s'élargit de plus en plus. Mais je crois que, globalement, ce qui ressort dans les trucs que j'écoute c'est des choses assez simples, assez répétitives, un peu entêtantes, que ce soient des trucs psychés ou bien du hip hop.
Plutôt Kaaris ou le Wu-Tang ?
Le Wu-Tang, carrément.
On trouve à l’écoute de tes chansons un vrai sens mélodique comme sur « Mal à la Tête », des paroles simples qui expriment de manière très directe un quotidien pas des plus ensoleillés ; Et si, face à Kaaris ou Booba qui ne parlent que de Kalash et de grosses voitures, le véritable rappeur en France n’était pas Ventre De Biche, qui parle d’alcool, de vigiles et de clochards ?
Il y a quelques trucs vraiment pas mal en Hip Hop : il y a ce groupe qui s'appelle Tête De Cerf, c'est des stéphanois, et eux pour le coup font vraiment du hip hop bien sale sur 4 pistes cassettes avec un son assez garage, et ils parlent à peu près des mêmes choses que moi, mais vraiment en version hip hop. Et à Strasbourg il y a un gars assez classe qui s'appelle Lacro, lui c'est un peu plus sérieux, un peu plus premier degrès. Et il a vraiment un truc, des textes très simples, très directs où il en veut un peu à tout le monde, et également avec un son 4 pistes cassettes assez lo-fi. Il y a quand même ces deux noms là, bien classes, qui prennent la place.
Tu as un label, Maison de Retraite, tu es dessinateur, tu fais de la musique dans de nombreux groupes, tu enchaînes les concerts, comment gères tu cette somme d’activités sans faire un burn-out ?
Après pour Maison de Retraite, label c'est un bien grand mot. C'est surtout un truc qui me permet de sortir des CD-R et des cassettes que je vend uniquement de la main à la main en concert, parce que je suis trop mauvais pour vendre des trucs par correspondance. C'est vraiment un loisir, pour le plaisir de faire un petit objet une fois de temps en temps, c'est pas un truc qui me bouffe tout mon temps. Et sinon, comme je ne travaille pas à côté, je peux consacrer mon temps à ça, c'est une chance et c'est assez cool.
Ces dernières années, on a plus vu les synthés utilisés par des groupes d’electro-pop mous, comme Metronomy par exemple ; alors que toi et des gars comme Colombey, Strasbourg ou Noir Boy George les réutilisent de façon urgente, crasseuse, punk...
Ouai, je suis assez d'accord. Cela rejoint ce truc là, de chansons simples, jouées de manière directes. C'est un peu comme du blues. Mais après dans tout ça, il y a beaucoup d'humour, c'est un peu une façon de faire des blagues avec des trucs pas drôles. Après, dans tous les groupes que tu cites, je pense qu'il n'y en a aucun qui tape dans la coldwave pompeuse et dépressive, genre l'expression des sentiments avec des mots compliqués etc. Je pense que dans tous les groupes que tu as cité il y a beaucoup de recul, il y a des gens qui s'amusent avant tout, et c'est ce qui fait la différence.
Noir Boy George ayant repris une chanson des Béruriers Noirs, est ce que tu penses que vous tous, cette scène là avec des synthés crasseux, vous seriez pas en quelque sorte les nouveaux punks français ?
Chez les Bérus, dans les premiers trucs, il y a vraiment des trucs mortels. Bon c'est déjà assez politisé, mais tu sens qu'ils ont vraiment la haine, leur son est hyper froid. C'est vraiment un truc assez minimal, avec plein de réverb. C'est quand même assez beau et assez touchant. Donc oui, je pense que c'est une influence.
Quels sont tes projets pour la suite ? Un album pour Sida, une suite pour Lésion Blanche ?
Je pars en tournée, fin avril début mai, dans le sud de la France, histoire de s'exiler un peu de l'Est. Pour SIDA, on l'a enregistré en janvier. C'est Thierry, qui joue avec moi dans Charnier, qui a enregistré tous nos morceaux depuis que l'on est quatre. Du coup, on a pas mal de morceaux, et on va essayer de les sortir, au moins sur un album et puis peut-être un 45 tours. Et je pense que l'on va essayer de trouver plein d'autres labels qui ont 50 euros à mettre chacuns, comme ça tout le monde récupère quelques copies et l'investissement est minimal. Pour Lésion Blanche, c'est plus compliqué car on se voit tous les 36 du mois, Quentin est à Lyon, Nafi à Metz, et moi je suis à Strasbourg, on fait à peu près un concert par an.
Est-ce que, comme tu le proclames dans une de tes chansons, « La Vie Est Un Long Fleuve De Merde » ?
(rires) Il y a des moments... Mais il y a des moments où c'est cool aussi. Faut le prendre comme des grosses tentatives de faire des blagues sur des sujets tristes, manière de prendre de la distance par rapport à tout ça.
Quelle est la genèse de ton projet, Ventre de Biche ?
Bah écoute, ça a commencé j'étais nouveau à Strasbourg. Je ne connaissais pas encore trop de gens pour faire de la musique, et du coup cela m'ennuyait, j'ai commencé à faire de la musique tout seul. Et j'ai passé pas mal de temps à essayer de trouver une formule, où j'arrivais à faire les mêmes morceaux en l'enregistrement qu'en concert, à peu près. Au début, je tatonnais : du coup je faisais une piste de batterie, un peu de guitare... Enfin des trucs impossibles à rejouer tout seul en concert. Du coup, quand j'ai repensé à ce vieux synthé qui trainait chez moi, c'était l'idéal en fait pour pouvoir tourner simplement, tout seul, en train. Cela me permettait de faire des tournées assez facilement, tout seul, sans avoir rien à demander, je pouvais juste prendre mon sac à dos, avec mon synthé dedans, c'est pratique.
C'est à peu près le même raisonnement que l'on peut retrouver chez des gars comme Jessica93 ou bien Scorpion Violente, cette recherche d'un moyen assez simple et direct afin de ne pas se prendre la tête pour tourner...
Il y a des contraintes à ne devoir utiliser au final qu'assez peu d'outils. Mais c'est pas mal d'essayer d'en faire le plus possible avec un truc assez minimal. Cela permet de cadrer pas mal le truc, c'est plutôt agréable
D'où vient le titre de cet album, « Viens Mourir » ?
En fait, c'est le titre d'un morceau que je ne joue plus. C'est un genre de slogan, une sorte de grosse blague négative.
Le genre de blague négative que l'on trouve beaucoup chez les artistes de La Grande Triple Alliance Internationale de l’Est dont tu fais partie ; est ce que tu peux nous parler de ce rassemblement ?
Cela existait bien avant que j'en fasse partie. Je l'ai découvert quand j'habitais encore à Lyon, avant de les connaitre personnellement. Et c'est sûr qu'il y a pas mal de groupes de chez eux qui m'ont bien décomplexé par rapport à pas mal de trucs, du genre ne plus trop se poser la question du style de musique que tu joues et chanter dans la langue que tu veux. C'était un grand soulagement pour moi de découvrir que tout est valable.
Tu chantes en français sur cet album, est ce que tu trouves qu'il est difficile de faire sonner la langue française ?
Je pense que c'est un pli qui se prend. Après, je pense qu'il est plus facile d'être précis dans une langue que tu maîtrises bien. Et des textes, j'en écris beaucoup plus que j'en chante, parce qu'il y en a plein que je trouve assez pourris. Il faut pas trop se poser de questions, faut écrire et puis voir après ce que tu gardes.
Ton album "Viens Mourir" sort chez Teenage Menopause Records ; comment s’est faite la connexion entre toi et Teenage Menopause ?
Par le biais de Froos, un des deux gars du label, celui qui habite à Paris, l'autre habitant à Bruxelles. Cela fait deux ans que l'on se croise assez régulièrement à des concerts, on a beaucoup discuté. Il a l'air d'être un mec assez curieux, bien à fond, et puis ça s'est fait par goûts musicaux.
Quelles sont tes influences musicales pour ce projet en particulier ?
J'aime bien les musiques assez répétitives en fait, peu importe le style. D'ailleurs, je pense que cela s'élargit de plus en plus. Mais je crois que, globalement, ce qui ressort dans les trucs que j'écoute c'est des choses assez simples, assez répétitives, un peu entêtantes, que ce soient des trucs psychés ou bien du hip hop.
Plutôt Kaaris ou le Wu-Tang ?
Le Wu-Tang, carrément.
On trouve à l’écoute de tes chansons un vrai sens mélodique comme sur « Mal à la Tête », des paroles simples qui expriment de manière très directe un quotidien pas des plus ensoleillés ; Et si, face à Kaaris ou Booba qui ne parlent que de Kalash et de grosses voitures, le véritable rappeur en France n’était pas Ventre De Biche, qui parle d’alcool, de vigiles et de clochards ?
Il y a quelques trucs vraiment pas mal en Hip Hop : il y a ce groupe qui s'appelle Tête De Cerf, c'est des stéphanois, et eux pour le coup font vraiment du hip hop bien sale sur 4 pistes cassettes avec un son assez garage, et ils parlent à peu près des mêmes choses que moi, mais vraiment en version hip hop. Et à Strasbourg il y a un gars assez classe qui s'appelle Lacro, lui c'est un peu plus sérieux, un peu plus premier degrès. Et il a vraiment un truc, des textes très simples, très directs où il en veut un peu à tout le monde, et également avec un son 4 pistes cassettes assez lo-fi. Il y a quand même ces deux noms là, bien classes, qui prennent la place.
Tu as un label, Maison de Retraite, tu es dessinateur, tu fais de la musique dans de nombreux groupes, tu enchaînes les concerts, comment gères tu cette somme d’activités sans faire un burn-out ?
Après pour Maison de Retraite, label c'est un bien grand mot. C'est surtout un truc qui me permet de sortir des CD-R et des cassettes que je vend uniquement de la main à la main en concert, parce que je suis trop mauvais pour vendre des trucs par correspondance. C'est vraiment un loisir, pour le plaisir de faire un petit objet une fois de temps en temps, c'est pas un truc qui me bouffe tout mon temps. Et sinon, comme je ne travaille pas à côté, je peux consacrer mon temps à ça, c'est une chance et c'est assez cool.
Ces dernières années, on a plus vu les synthés utilisés par des groupes d’electro-pop mous, comme Metronomy par exemple ; alors que toi et des gars comme Colombey, Strasbourg ou Noir Boy George les réutilisent de façon urgente, crasseuse, punk...
Ouai, je suis assez d'accord. Cela rejoint ce truc là, de chansons simples, jouées de manière directes. C'est un peu comme du blues. Mais après dans tout ça, il y a beaucoup d'humour, c'est un peu une façon de faire des blagues avec des trucs pas drôles. Après, dans tous les groupes que tu cites, je pense qu'il n'y en a aucun qui tape dans la coldwave pompeuse et dépressive, genre l'expression des sentiments avec des mots compliqués etc. Je pense que dans tous les groupes que tu as cité il y a beaucoup de recul, il y a des gens qui s'amusent avant tout, et c'est ce qui fait la différence.
Noir Boy George ayant repris une chanson des Béruriers Noirs, est ce que tu penses que vous tous, cette scène là avec des synthés crasseux, vous seriez pas en quelque sorte les nouveaux punks français ?
Chez les Bérus, dans les premiers trucs, il y a vraiment des trucs mortels. Bon c'est déjà assez politisé, mais tu sens qu'ils ont vraiment la haine, leur son est hyper froid. C'est vraiment un truc assez minimal, avec plein de réverb. C'est quand même assez beau et assez touchant. Donc oui, je pense que c'est une influence.
Quels sont tes projets pour la suite ? Un album pour Sida, une suite pour Lésion Blanche ?
Je pars en tournée, fin avril début mai, dans le sud de la France, histoire de s'exiler un peu de l'Est. Pour SIDA, on l'a enregistré en janvier. C'est Thierry, qui joue avec moi dans Charnier, qui a enregistré tous nos morceaux depuis que l'on est quatre. Du coup, on a pas mal de morceaux, et on va essayer de les sortir, au moins sur un album et puis peut-être un 45 tours. Et je pense que l'on va essayer de trouver plein d'autres labels qui ont 50 euros à mettre chacuns, comme ça tout le monde récupère quelques copies et l'investissement est minimal. Pour Lésion Blanche, c'est plus compliqué car on se voit tous les 36 du mois, Quentin est à Lyon, Nafi à Metz, et moi je suis à Strasbourg, on fait à peu près un concert par an.
Est-ce que, comme tu le proclames dans une de tes chansons, « La Vie Est Un Long Fleuve De Merde » ?
(rires) Il y a des moments... Mais il y a des moments où c'est cool aussi. Faut le prendre comme des grosses tentatives de faire des blagues sur des sujets tristes, manière de prendre de la distance par rapport à tout ça.