La Vie Electrique (PIAS) // par Anton Schaeffer
Le mois de septembre s'impose à nous, avec son terrible cortège : le retour au boulot, et donc la fin des vacances, l'automne qui se profile déjà, le froid, la pluie, la grisaille... Alors, pour éviter d'embrasser le même destin que celui de Ian Curtis de Joy Division, voilà pour nous notre meilleur espoir de voir venir l'été indien : à savoir, le nouvel album d'Aline, « La Vie Électrique ».
Avant de s’appeler ainsi, le groupe mené par Romain Guerret avait pour nom Young Michelin. Et une des premières chansons de la formation était « Elle m'oubliera » : on y trouvait la grisaille de Bristol, une boite à rythme, une tension, une urgence, des paroles effroyables de justesse, chantées la gorge nouée ; tétanisante. Mais, il faut bien admettre que la musique d'Aline est loin de faire l'unanimité. Sur les réseaux sociaux, face à des ayatollahs auto-proclamés du bon goût, Aline s'avère être un groupe clivant : poster leur dernier titre sur Facebook, c'est s'attirer des réflexions comme si on avait posté un message de soutien à Daesh. Le groupe est tout à tour comparé à Indochine, Partenaire Particulier, accusé de mièvrerie, de donner dans le pathos... Ces réactions hystériques tendent à confirmer le fait que le groupe se trouve sur un carrefour délicat : musique jugée trop pop pour certains, pas assez formatée pour d’autres.
Côté influences, Aline va lorgner vers Daho, Yves Simon, Gamine, The Smiths... Justement, pour la réalisation de ce deuxième album, Aline s'offre les services d'un grand homme, Stephen Street, producteur d'albums emblématiques pour The Smiths, Morrissey, Blur... C'est ici la première fois que le producteur anglais collabore avec des français. Et, il faut bien dire que le travail de ce dernier impressionne par le niveau de production déployé sur l'ensemble du disque : un soin tout particulier apporté à chaque instrument, de belles couleurs musicales, une profondeur dans le son... Dès la première écoute, on comprend que l'on a devant nous un album ambitieux, et surtout un groupe qui s'est donné les moyens de ses ambitions. Le résultat esquisse une musique sans pose, épurée, une évidence mélodique, de l'érotisme et des sentiments charnels.
On retrouve sur cet album l’efficacité pop du premier disque, notamment sur des titres comme « Chaque Jour Qui Passe » et « Avenue Des Armées ». On reste soufflés par la « Tristesse de la balance », chanson faisant la part belle à l'électronique, et qui pourrait rappeler Sébastien Tellier au plus haut de sa forme (période « Sexuality »). Il y a également ce morceau, « Promis, Juré, Craché », entre Plastic Bertrand et les Buzzcocks, constituant l'ultime coup de pelle à ceux qui voulait réduire Aline à un simple revival indie pop. Et que dire du morceau qui donne le titre à l'album, « La Vie Électrique », sinon qu'il symbolise à lui seul une certaine perfection pop. Il est bien difficile alors de choisir un titre préféré parmi ces nouvelles chansons, tant l'ensemble est de très bonne facture. Si il fallait néanmoins en désigner un, ce serait peut-être la piste cachée de l'album, « Mon Dieu Mes Amis », véritable synthèse du son de cet album, aux paroles parfaites : « Une vague immense me soulève, au-dessus du rivage, le vertige et l'angoisse me guettent / Un vent contraire surpuissant, m'a éloigné de toi, je reste seul à l'autre bout de la laisse / Je disparais tout au fond de moi-même, adieu mes amis je laisse toute une vie derrière moi / Je suis ici et puis là, j'anticipe le départ, perdu au milieu d'une forêt de bras ».
Les évocations à l'écoute de cet album couvrent un prisme assez large : la pop des années 70 et 80, l'élégance de la pop italienne, la musique électronique, certains accents pop-punk, le dub... Ainsi, on trouve dans ces nouvelles chansons de nouvelles directions musicales, une prise de risques comparé au premier album. Tout au long de ce deuxième album, Aline semble casser les murs exiguës au sein desquels on aurait pu cantonner leur musique, à savoir indie pop / Sarah Records / ligne claire. Le groupe s'affranchit donc des dogmes et des étiquettes, s'approprie tout un tas d'influences pour créer sa propre patte, une vraie esthétique, un parti-pris.
Face à une société du fun désespérant et du cool totalitaire, Aline met en musique le tragique. En opposition au pessimisme et à l’optimisme, le groupe défend ici une vision du monde tragique : le monde est tel qu’il est, essayons alors de faire avec, du mieux possible. Une musique faite de nuances et de dualités, dans laquelle s'entrechoquent la joie et la mélancolie, l'amour, la rupture, l'espérance et le temps qui passe, inexorablement. Le tout porté par une sincérité touchante et une intention artistique authentique. Véritable bijou pop, ce deuxième album d’Aline est un mille-feuille que l’on mangerait comme un défi lancé au diabète : généreux, jouissif, un plaisir immédiat.
Avant de s’appeler ainsi, le groupe mené par Romain Guerret avait pour nom Young Michelin. Et une des premières chansons de la formation était « Elle m'oubliera » : on y trouvait la grisaille de Bristol, une boite à rythme, une tension, une urgence, des paroles effroyables de justesse, chantées la gorge nouée ; tétanisante. Mais, il faut bien admettre que la musique d'Aline est loin de faire l'unanimité. Sur les réseaux sociaux, face à des ayatollahs auto-proclamés du bon goût, Aline s'avère être un groupe clivant : poster leur dernier titre sur Facebook, c'est s'attirer des réflexions comme si on avait posté un message de soutien à Daesh. Le groupe est tout à tour comparé à Indochine, Partenaire Particulier, accusé de mièvrerie, de donner dans le pathos... Ces réactions hystériques tendent à confirmer le fait que le groupe se trouve sur un carrefour délicat : musique jugée trop pop pour certains, pas assez formatée pour d’autres.
Côté influences, Aline va lorgner vers Daho, Yves Simon, Gamine, The Smiths... Justement, pour la réalisation de ce deuxième album, Aline s'offre les services d'un grand homme, Stephen Street, producteur d'albums emblématiques pour The Smiths, Morrissey, Blur... C'est ici la première fois que le producteur anglais collabore avec des français. Et, il faut bien dire que le travail de ce dernier impressionne par le niveau de production déployé sur l'ensemble du disque : un soin tout particulier apporté à chaque instrument, de belles couleurs musicales, une profondeur dans le son... Dès la première écoute, on comprend que l'on a devant nous un album ambitieux, et surtout un groupe qui s'est donné les moyens de ses ambitions. Le résultat esquisse une musique sans pose, épurée, une évidence mélodique, de l'érotisme et des sentiments charnels.
On retrouve sur cet album l’efficacité pop du premier disque, notamment sur des titres comme « Chaque Jour Qui Passe » et « Avenue Des Armées ». On reste soufflés par la « Tristesse de la balance », chanson faisant la part belle à l'électronique, et qui pourrait rappeler Sébastien Tellier au plus haut de sa forme (période « Sexuality »). Il y a également ce morceau, « Promis, Juré, Craché », entre Plastic Bertrand et les Buzzcocks, constituant l'ultime coup de pelle à ceux qui voulait réduire Aline à un simple revival indie pop. Et que dire du morceau qui donne le titre à l'album, « La Vie Électrique », sinon qu'il symbolise à lui seul une certaine perfection pop. Il est bien difficile alors de choisir un titre préféré parmi ces nouvelles chansons, tant l'ensemble est de très bonne facture. Si il fallait néanmoins en désigner un, ce serait peut-être la piste cachée de l'album, « Mon Dieu Mes Amis », véritable synthèse du son de cet album, aux paroles parfaites : « Une vague immense me soulève, au-dessus du rivage, le vertige et l'angoisse me guettent / Un vent contraire surpuissant, m'a éloigné de toi, je reste seul à l'autre bout de la laisse / Je disparais tout au fond de moi-même, adieu mes amis je laisse toute une vie derrière moi / Je suis ici et puis là, j'anticipe le départ, perdu au milieu d'une forêt de bras ».
Les évocations à l'écoute de cet album couvrent un prisme assez large : la pop des années 70 et 80, l'élégance de la pop italienne, la musique électronique, certains accents pop-punk, le dub... Ainsi, on trouve dans ces nouvelles chansons de nouvelles directions musicales, une prise de risques comparé au premier album. Tout au long de ce deuxième album, Aline semble casser les murs exiguës au sein desquels on aurait pu cantonner leur musique, à savoir indie pop / Sarah Records / ligne claire. Le groupe s'affranchit donc des dogmes et des étiquettes, s'approprie tout un tas d'influences pour créer sa propre patte, une vraie esthétique, un parti-pris.
Face à une société du fun désespérant et du cool totalitaire, Aline met en musique le tragique. En opposition au pessimisme et à l’optimisme, le groupe défend ici une vision du monde tragique : le monde est tel qu’il est, essayons alors de faire avec, du mieux possible. Une musique faite de nuances et de dualités, dans laquelle s'entrechoquent la joie et la mélancolie, l'amour, la rupture, l'espérance et le temps qui passe, inexorablement. Le tout porté par une sincérité touchante et une intention artistique authentique. Véritable bijou pop, ce deuxième album d’Aline est un mille-feuille que l’on mangerait comme un défi lancé au diabète : généreux, jouissif, un plaisir immédiat.