Christmas in Reno (Burger Records 2015) // Par Laetitia Lacourt - translation by Oscar Mavioc'h
Mon très cher Santa,
On a vite compris que 2015 serait foutrement moins drôle que 2014. Toi aussi, tu as eu vent de l’année de merde que l’on vient de passer et que ce n’est pas une orange sous le Nordmann qui va nous mettre en liesse. Faut avouer que ça a dû mal à clignoter cette année, et que si nous avons mis tant de temps à sortir les boules, c'est sûrement parce qu’on les a eues toute l'année.
Mais te revoilà quand même, avec tes lutins et tes symboles de gros love, de générosité, de partage et d’échange. Et je dois avouer que ta bonhomie bienveillante m’est aussi insupportable que les Ho Ho Ho que tu claironnes gaiement.
Mais au-delà de ton côté gai luron, ce qui me rend le plus épileptique, ce sont les chansons qui parlent de toi. La magie de Noël, les petits souliers par milliers, la neige, tout ça. Comme un excès de dinde fourrée de farce sèche, ça ne passe pas. De John Lennon aux Ramones en passant par Elvis et Otis Redding, ou cerise sur la bûche, Georges Michaël : les mélodies qui te célèbrent sont tellement cuculs et repentantes !
Titres anxiogènes blindés de clochettes qui tintinnabulent à souhait, de grelots aigus mal accordés, de bruitages de traîneau mené par une horde de rênes castrés et autres tambourins à cymbalettes secoués vigoureusement : la chanson de Noël est aussi gerbante que la liqueur de sapin. Comme ta barbe et ton costume, toutes ces compositions finissent par devenir une vaste mascarade derrière laquelle se cache une belle opération mercantile, aux yeux des grands enfants que nous sommes.
Problème épineux, depuis quelques années, il semblerait que le rocker te fasse honneur (Régal, The Liminanas, Jaromil Sabor & Precheur Loup, Black Lips, Reigning Sound) m’obligeant à réviser mon jugement. Non pas sur la chanson de Noël en elle-même mais sur la teinte joyeuse que les artistes s’efforcent toujours à lui donner. Et c’est là que Cassie Ramone entre en scène. L’intelligence lui ayant évité de tomber dans le traîneau et dans le panneau, l’ex Vivian Girls et The Babies vient de t’offrir un vrai beau cadeau, « Christmas in Reno », un album entier de reprises de tubes de Noël, signé chez Burger Records. Refusant de tomber dans le piège de ton folklore scintillant, Cassie Ramone est la première à se débarrasser des encombrants artifices et autres emballages superflus que tu influes et la première aussi à s’approprier 10 titres qui ne ressemblent pas à une compil des pires Walt Disney. Parce que c’est pas joyeux joyeux. C’est même triste à chialer. De Nat King Cole à Bing Crosby en passant par Paul Mc Cartney et Darlene Love, ses reprises sont mélancoliques, pleines d’amertume, ultras intimistes et mettent l’accent sur notre vulnérabilité et le sentiment de solitude que cette période de l’année peut engendrer (qui s’appelle aussi la gaieté forcée).
Bien plus qu’un simple album de reprises, complètement réarrangé (certains titres sont carrément méconnaissables, avec de la reverb, des petites guitares surf et garantis sans clochette), « Christmas in Reno » est également parodique : Cassie s’est aussi amusée à changer quelques paroles, se foutant ouvertement de ta gueule. Si, si.
Et ça fait du bien. Ca fait du bien de ne pas se taper un album de chansons de Noël, mielleux et joyeux, qui dégouline de tes bons sentiments. Donc si tu pouvais un peu moins la ramener avec tes onomatopées et ton sourire enjôleur de vendeur de soda, ça serait sympa. Enfin, dernier conseil pour la route cher Santa, la France étant en état d’urgence, côté cheminées, il va vraiment falloir montrer barbe blanche. Côté chansons de noël, rassure-toi, les voix sont désormais libres : Cassie a bien ramoné.
-------------- English version by Oscar Mavioc'h ---------------
My very dear Santa,
Maybe you understood that 2015 would be less fun than 2014. You, as well, have smelt the scum wind of this year we just passed through and you realized that's not with an orange under the Nordmann that we would cheer up again. Lights are hard to blink this year, and if so much time has been needed to take out the Christmas balls, it's probably because we've had them all along the year.
But here you are again, with your leprechauns and your big symbols of love, of generosity, of sharing. And I have to recognize that your kindness is as annoying as your Ho ho ho's.
But, despite your ready smile, what makes me epileptic the most, are the songs talking about you. Christmas magic, the little socks under the tree, the snow, all of it. Like an excess of very dry stuffed turkey , it doesn't pass in my throat. From John Lennon to the Ramones, passing by Elvis and Otis Redding, or ice on the iced christmas cake, Georges Michaël : the melodies that clebrate you are less claptraps than repantant.
Anxiety-provoking titles full of ringing jingles, acute bells badly granted, sled's noises led by a hord of neutered reindeers and others hardly shaken tambourines with small cymbals : the Christmas song is as puking as the pine liquor. As your beard and your suit, all of those compositions become a huge masquerade hiding a fucking mercantile operation, seen by big children eyes, the ones we still have.
Thorny issue since a few years, it seems that rockers want to honor you (Régal, The Liminanas, Jaromil Sabor & Precheur Loup, Black Lips, Reigning Sound) force me to revise my judgement. Not about the Christmas song itself but about the happy shade that artists are endeavouring to give to it. And it's time for Cassie Ramone to get on the stage. Intelligence has permited to her to not be packed but neither traped, the ex-Vivian Girls and ex-The Babies comes with a real gift, « Chritmas in Reno », an album which is full of Christmas hits covers, signed by Burger Records. Refusing to be trapped in your glittering folklore, dear Santa, Cassie Ramone is the first to throw off your obstructing artifice and others useless packages that you're involved to, and, also, she is the first to appropriate to herself ten tracks that don't look like at all to the worst crappy Walt Disney compilations. Because it's not happy. Well, not so much !
To be really honest, it's fucking sad to cry. From Nat King Cole to Bing Crosby, passing by Paul Mc Cartney and Darlene Love, her covers are melancholic, full of bitterness, very intimist and point their finger on our own vulnerability and the loneliness feeling brought by this period (also named : forced happiness).
More than a simple covers album, totally re-arranged (a few titles are totally unrecognizable, with reverb, tiny surf guitars and guaranteed without any jingles), « Christmas in Reno » is also parodic : Cassie has some fun, as well, to change a couple of lyrics, mocking you very deeply. I swear !
And it makes feel so good. It feels so good to not endure another Christmas songs album, sliming happiness, trickling your good feelings. So, if you could shut the fuck up with your onomatopoeias and your wheedling Coke saler smile, it would be very kind of you. Finally, a last advice for the road dear Santa : France being under emergency state, on the fireplace side, you'll have better to show white beard. On the Christmas songs side, be sure that ways are henceforth free: Cassie has Ramoned and she did a good job.
On a vite compris que 2015 serait foutrement moins drôle que 2014. Toi aussi, tu as eu vent de l’année de merde que l’on vient de passer et que ce n’est pas une orange sous le Nordmann qui va nous mettre en liesse. Faut avouer que ça a dû mal à clignoter cette année, et que si nous avons mis tant de temps à sortir les boules, c'est sûrement parce qu’on les a eues toute l'année.
Mais te revoilà quand même, avec tes lutins et tes symboles de gros love, de générosité, de partage et d’échange. Et je dois avouer que ta bonhomie bienveillante m’est aussi insupportable que les Ho Ho Ho que tu claironnes gaiement.
Mais au-delà de ton côté gai luron, ce qui me rend le plus épileptique, ce sont les chansons qui parlent de toi. La magie de Noël, les petits souliers par milliers, la neige, tout ça. Comme un excès de dinde fourrée de farce sèche, ça ne passe pas. De John Lennon aux Ramones en passant par Elvis et Otis Redding, ou cerise sur la bûche, Georges Michaël : les mélodies qui te célèbrent sont tellement cuculs et repentantes !
Titres anxiogènes blindés de clochettes qui tintinnabulent à souhait, de grelots aigus mal accordés, de bruitages de traîneau mené par une horde de rênes castrés et autres tambourins à cymbalettes secoués vigoureusement : la chanson de Noël est aussi gerbante que la liqueur de sapin. Comme ta barbe et ton costume, toutes ces compositions finissent par devenir une vaste mascarade derrière laquelle se cache une belle opération mercantile, aux yeux des grands enfants que nous sommes.
Problème épineux, depuis quelques années, il semblerait que le rocker te fasse honneur (Régal, The Liminanas, Jaromil Sabor & Precheur Loup, Black Lips, Reigning Sound) m’obligeant à réviser mon jugement. Non pas sur la chanson de Noël en elle-même mais sur la teinte joyeuse que les artistes s’efforcent toujours à lui donner. Et c’est là que Cassie Ramone entre en scène. L’intelligence lui ayant évité de tomber dans le traîneau et dans le panneau, l’ex Vivian Girls et The Babies vient de t’offrir un vrai beau cadeau, « Christmas in Reno », un album entier de reprises de tubes de Noël, signé chez Burger Records. Refusant de tomber dans le piège de ton folklore scintillant, Cassie Ramone est la première à se débarrasser des encombrants artifices et autres emballages superflus que tu influes et la première aussi à s’approprier 10 titres qui ne ressemblent pas à une compil des pires Walt Disney. Parce que c’est pas joyeux joyeux. C’est même triste à chialer. De Nat King Cole à Bing Crosby en passant par Paul Mc Cartney et Darlene Love, ses reprises sont mélancoliques, pleines d’amertume, ultras intimistes et mettent l’accent sur notre vulnérabilité et le sentiment de solitude que cette période de l’année peut engendrer (qui s’appelle aussi la gaieté forcée).
Bien plus qu’un simple album de reprises, complètement réarrangé (certains titres sont carrément méconnaissables, avec de la reverb, des petites guitares surf et garantis sans clochette), « Christmas in Reno » est également parodique : Cassie s’est aussi amusée à changer quelques paroles, se foutant ouvertement de ta gueule. Si, si.
Et ça fait du bien. Ca fait du bien de ne pas se taper un album de chansons de Noël, mielleux et joyeux, qui dégouline de tes bons sentiments. Donc si tu pouvais un peu moins la ramener avec tes onomatopées et ton sourire enjôleur de vendeur de soda, ça serait sympa. Enfin, dernier conseil pour la route cher Santa, la France étant en état d’urgence, côté cheminées, il va vraiment falloir montrer barbe blanche. Côté chansons de noël, rassure-toi, les voix sont désormais libres : Cassie a bien ramoné.
-------------- English version by Oscar Mavioc'h ---------------
My very dear Santa,
Maybe you understood that 2015 would be less fun than 2014. You, as well, have smelt the scum wind of this year we just passed through and you realized that's not with an orange under the Nordmann that we would cheer up again. Lights are hard to blink this year, and if so much time has been needed to take out the Christmas balls, it's probably because we've had them all along the year.
But here you are again, with your leprechauns and your big symbols of love, of generosity, of sharing. And I have to recognize that your kindness is as annoying as your Ho ho ho's.
But, despite your ready smile, what makes me epileptic the most, are the songs talking about you. Christmas magic, the little socks under the tree, the snow, all of it. Like an excess of very dry stuffed turkey , it doesn't pass in my throat. From John Lennon to the Ramones, passing by Elvis and Otis Redding, or ice on the iced christmas cake, Georges Michaël : the melodies that clebrate you are less claptraps than repantant.
Anxiety-provoking titles full of ringing jingles, acute bells badly granted, sled's noises led by a hord of neutered reindeers and others hardly shaken tambourines with small cymbals : the Christmas song is as puking as the pine liquor. As your beard and your suit, all of those compositions become a huge masquerade hiding a fucking mercantile operation, seen by big children eyes, the ones we still have.
Thorny issue since a few years, it seems that rockers want to honor you (Régal, The Liminanas, Jaromil Sabor & Precheur Loup, Black Lips, Reigning Sound) force me to revise my judgement. Not about the Christmas song itself but about the happy shade that artists are endeavouring to give to it. And it's time for Cassie Ramone to get on the stage. Intelligence has permited to her to not be packed but neither traped, the ex-Vivian Girls and ex-The Babies comes with a real gift, « Chritmas in Reno », an album which is full of Christmas hits covers, signed by Burger Records. Refusing to be trapped in your glittering folklore, dear Santa, Cassie Ramone is the first to throw off your obstructing artifice and others useless packages that you're involved to, and, also, she is the first to appropriate to herself ten tracks that don't look like at all to the worst crappy Walt Disney compilations. Because it's not happy. Well, not so much !
To be really honest, it's fucking sad to cry. From Nat King Cole to Bing Crosby, passing by Paul Mc Cartney and Darlene Love, her covers are melancholic, full of bitterness, very intimist and point their finger on our own vulnerability and the loneliness feeling brought by this period (also named : forced happiness).
More than a simple covers album, totally re-arranged (a few titles are totally unrecognizable, with reverb, tiny surf guitars and guaranteed without any jingles), « Christmas in Reno » is also parodic : Cassie has some fun, as well, to change a couple of lyrics, mocking you very deeply. I swear !
And it makes feel so good. It feels so good to not endure another Christmas songs album, sliming happiness, trickling your good feelings. So, if you could shut the fuck up with your onomatopoeias and your wheedling Coke saler smile, it would be very kind of you. Finally, a last advice for the road dear Santa : France being under emergency state, on the fireplace side, you'll have better to show white beard. On the Christmas songs side, be sure that ways are henceforth free: Cassie has Ramoned and she did a good job.